Pourquoi les cystites récidivent?

Les cystites récidivantes constituent un problème de santé courant, en particulier chez la femme, et ont un impact majeur sur la qualité de vie. Au-delà des symptômes bien connus, brûlures mictionnelles, besoins fréquents, inconfort pelvien, la répétition des épisodes impose d’élargir la réflexion à l’ensemble du terrain.

Depuis quelques années, la recherche a mis en évidence l’importance des différents microbiotes (intestinal, vaginal, urinaire) et de leurs interactions dans la genèse et l’entretien des infections urinaires à répétition. Les progrès dans la compréhension du rôle des muqueuses et de l’équilibre microbien permettent aujourd’hui d’envisager des stratégies de prévention et de prise en charge plus efficaces et durables.

Cet article fait le point sur les connaissances récentes, les mécanismes principaux, et livre des conseils pratiques validés pour limiter le risque de récidive.

Un contexte anatomique favorable

Chez la femme, la cystite est très fréquente, notamment à l’âge jeune et moyen, en raison de la morphologie : l’urètre court et proche de la zone anale favorise la remontée des bactéries depuis le périnée.
Chez l’homme, la cystite est plus rare ; elle survient le plus souvent après 50 ans, en lien avec des troubles prostatiques ou d’autres pathologies urinaires.

Des microbiotes en dialogue permanent

Contrairement à ce que l’on pensait encore récemment, la vessie possède, elle aussi, son propre microbiote : un écosystème de bactéries, protectrices et pathogènes, en équilibre dynamique avec les microbiotes intestinal, vaginal, mais aussi cutané et respiratoire.

Nous avons donc plusieurs microbiotes :

Tous ces microbiotes communiquent et s’influencent mutuellement. Le bon fonctionnement repose sur un subtil équilibre : les bactéries dites “saprophytes” (protectrices) maintiennent les pathogènes sous contrôle. Lorsque cet équilibre se rompt, des troubles peuvent apparaître, dont la cystite par exemple.

E. Coli : un habitant normal, mais à contrôler

Dans le cas de la cystite, la recherche pointe en premier lieu Escherichia Coli, une bactérie naturellement présente dans le microbiote intestinal. Contrairement à une idée reçue, E. coli n’est pas un “ennemi” à éradiquer. Au contraire, il s’agit d’un hôte physiologique normal, utile à la digestion et au maintien de la diversité microbienne. Ce n’est que lorsqu’elle prolifère de façon excessive ou migre vers d’autres organes (vessie, vagin) que cette bactérie devient pathogène et responsable d’infections à répétition.

Le véritable enjeu est donc la préservation de l’équilibre de l’ensemble du microbiote (surtout intestinal, vaginal et urinaire dans le cas des cystites) pour limiter la migration et la multiplication des bactéries pathogènes.

Les découvertes récentes sur les interactions organes-microbiotes

Plusieurs études de référence nous ont permis de mieux comprendre les cystites récidivantes.

• Worby et al., Nature Microbiology, 2022 : a démontré que l’intestin joue le rôle de réservoir principal pour E. Coli. Après traitement antibiotique, la bactérie disparaît de l’urine mais persiste dans l’intestin, d’où elle peut rapidement recoloniser la vessie.

• Meštrović et al., Diagnostics, 2020 : souligne que le déséquilibre du microbiote vaginal ou intestinal favorise la migration des bactéries vers la vessie.

• Choi et al., Microorganisms, 2023 : met en lumière l’axe intestin-vagin-vessie, c’est-à-dire l’interaction constante entre ces microbiotes.

Dans notre corps, les organes ne sont pas isolés les uns des autres : ils sont anatomiquement très proches. Ils sont en quelque sorte superposés les uns avec les autres, comme des sardines dans une boîte. La muqueuse intestinale côtoie la zone vaginale, elle-même voisine de la vessie.

Source : The Role of Gut, Vaginal, and Urinary Microbiome in Urinary Tract Infections: From Bench to Bedside, Meštrović et al. (2020)

Cette proximité explique pourquoi une altération du microbiote ou une fragilité de la muqueuse (porosité) facilite la migration des bactéries d’un organe à l’autre. Si la barrière naturelle des muqueuses est compromise (inflammation, antibiotique, stress…), les germes pathogènes se déplacent plus facilement, d’où l’importance d’une prévention globale.

Mycoses et cystites récidivantes : des liens étroits

Les cystites récidivantes sont aussi souvent associées à des épisodes répétés de mycoses vaginales (candidoses), plusieurs facteurs l’expliquent :

• Les antibiotiques éliminent les bactéries protectrices du microbiote vaginal, favorisant la prolifération du champignon Candida albicans,

• Un déséquilibre du microbiote vaginal rend la muqueuse plus perméable et fragile,

• Les passages de bactéries entre intestin, vagin et vessie sont facilités par la porosité des muqueuses.

Il est donc essentiel de restaurer et préserver l’équilibre de tous les microbiotes pour éviter l’installation d’un cercle vicieux.

Les conseils concrets pour limiter les récidives

Des gestes simples permettent de préserver l’équilibre microbien et de limiter la migration des bactéries :

Avoir une hygiène intime adaptée!

• Privilégier un savon doux, respectant le pH physiologique (Gynea de Cattier, savon au Calendula de Weleda)

• Éviter les douches vaginales et les produits antiseptiques

• S’essuyer d’avant en arrière après les selles

• Uriner après chaque rapport

• Ne pas se retenir trop longtemps

• Privilégier des sous-vêtements en coton, éviter les vêtements trop serrés

Préserver le microbiote

• Éviter les traitements antibiotiques récurrents

• Favoriser une alimentation crue, riche en fibres et riche en pré- & pro-biotiques (fruits, légumes crus, céréales complètes, lactofermenté)

Limiter la constipation

• Boire une eau de qualité et en quantité suffisante

• Pratiquer une activité physique régulière (rien que la marche après le repas est suffisante)

• Avoir une alimentation variée et riche en fibres

La cystite dans la symbolique

Au-delà du corps, la médecine psycho-corporelle rappelle que chaque symptôme est porteur de sens (la maladie = le mal a dit). La cystite, en touchant la sphère intime et l’espace du territoire, traduit une difficulté à poser ses limites, à se sentir respecté.e ou protégé.e dans son espace personnel, ou encore à exprimer une colère ou une frustration que finalement nous retenons et qui brûle de l'intérieur. À méditer...

Pour aller plus loin

Comprendre les microbiotes
Le charme discret de l’intestin, Giulia Enders (Actes Sud, 2014)
Un ouvrage accessible et captivant pour comprendre le rôle du microbiote intestinal dans la santé globale, la digestion, l’immunité, et ses liens avec les autres microbiotes du corps.

Lien entre E. coli, infections urinaires et récidives
Recurrent urinary tract infections: the role of the intestinal reservoir Review, Nature Reviews Urology, 2022
Une synthèse scientifique (en anglais) faisant le point sur la manière dont E. coli du microbiote intestinal est à l’origine de la plupart des cystites récidivantes, et sur les stratégies préventives actuelles.

Symbolique et sens des maladies
Découvrir le sens caché des maladies, Luc Bodin (Éditions Guy Trédaniel, 2017)
Ce livre propose une réflexion claire sur les causes émotionnelles ou psycho-corporelles des maladies, dont les infections urinaires, pour mieux comprendre le message du corps.