La perte de poids : un nouveau regard
Souvent nous associons la perte de poids avec la nécessité de mettre en place un régime, de restreindre nos calories et d'avoir la volonté de faire du sport. Certains essaient, d'autres non, et parfois, après quelques tentatives, les résultats sont décourageants. On peut alors tomber dans une boucle de culpabilité et de dévalorisation : qu'est-ce que je fais mal? Pourquoi mon corps ne réponds pas? C'est quoi mon problème?
Alors déjà, remettons les choses dans leur contexte : des décennies d’agro-alimentation et d'environnement pollué et stressant ont profondément modifié nos métabolismes. Notre microbiote s'est considérablement dégradé au cours de ces quelques dernières générations et cela n'est pas sans conséquence sur notre capacité à réguler nos fonctions corporelles (humeur, volonté, poids, etc.).
Pour changer de regard sur le poids et l'obésité, je vous conseille chaudement le documentaire d'Arte, Un Monde Obèse, qui est extrêmement bien mené et pertinent. Il souligne notamment la complexité des mécanismes en jeu.
Car la prise de poids n’est pas un simple déséquilibre entre apports et dépenses caloriques. C’est un phénomène multifactoriel dans lequel interviennent plusieurs systèmes interdépendants :
Le microbiote intestinal
L’inflammation systémique
L’axe thyroïdien
Le stress et les neurotransmetteurs
L’équilibre hormonal (stéroïdes sexuels)
La régulation de la glycémie
Vous n'avez peut-être compris que la moitié de cette liste, peu importe 🙂 ici l'idée est de comprendre que tout est lié et de vous partager des solutions efficaces pour démarrer un parcours de perte de poids en conscience et durable.
Commençons par expliquer les mécanismes en jeu
Le microbiote intestinal et l'inflammation systémique
Aujourd'hui, pléthores d'études scientifiques démontrent qu'il existe un lien entre le microbiote intestinal (l'équilibre entre nos bonnes et nos mauvaises bactéries) et la régulation du poids. Lorsque le microbiote est déséquilibré (dysbiose), cela peut entraîner une inflammation dite de "bas grade", parfois silencieuse mais toujours persistante. Elle est favorisée par les mauvaises bactéries qui relarguent ce qu'on appelle des endotoxines. Ces mauvaises bactéries sont notamment les bactéries à "gram-négatives", qui possèdent une membrane externe plus épaisse que les autres bactéries. Cela les rend résistantes aux antibiotiques.
Une accumulation de ces bactéries à gram-négatives peut, sur le long-terme, mener à une hyperperméabilité intestinale (leaky gut), où la barrière intestinale devient poreuse (une vraie passoire!). Cette porosité laisse passer des composés inflammatoires dans la circulation sanguine, perturbant le métabolisme, favorisant une résistance à l’insuline, des troubles cognitifs... et jusqu’à générer des compulsions alimentaires.
L’intestin n'est pas que le siège de notre digestion, il est aussi incontournable dans la production de nombreux neurotransmetteurs. Pour ne citer que ceux qui nous intéressent dans cet article :
La sérotonine : elle permet le sommeil, régule l'humeur et équilibre nos pulsions (elle est produite par les cellules entérochromaffines de l'intestin)
Le GABA : il prévient l'anxiété, le stress et les troubles du sommeil (il est produit à partir de la L-Glutamine qui se trouve dans l'intestin)
Dès lors, un microbiote déséquilibré entraine une mauvaise production, voire une non-production de nos neurotransmetteurs. Et particulièrement, quand le sommeil vient à manquer, 2 hormones clés dans la satiété se dérégulent : la leptine et l'orexine. La leptine freine l'appétit et l'orexine favorise l'éveil et la prise de nourriture. On parle alors de leptino-résistance.
Le corps commence alors à développer du stress endogène : il se stresse tout seul, car certaines de ses fonctions ne sont pas optimales.
Si on ajoute à ce stress endogène du stress qui vient de l'extérieur (travail, famille, soucis, conflits, etc.) notre stress devient généralisé et chronique.
Stress, sommeil et cortisol
Et que fait le stress chronique? Il fait augmenter la production de cortisol. Le cortisol a pour fonction d'aller chercher du sucre rapidement dans nos réserves et de le mettre à disposition du sang pour produire de l'énergie (car en état de stress nous devons absolument être réactif : fuir ou combattre - pour notre survie). Or qui dit stress constant, dit cortisol en permanence. Et qui dit cortisol en permanence dit "besoin de sucre H24 dans notre sang" (qu'il provienne de nos propres réserves ou de ces cookies trop bons de la boulangerie d'à côté). Et quand le sucre est constamment présent dans le sang, cela entraîne, sur le long-terme, de l'insulino-résistance.
Et au milieu de tout ça ? Nous avons la thyroïde qui a pour rôle central d'accélérer ou de ralentir la production des hormones. Elle essaie de joindre les 2 bouts et elle s'adapte en permanence - plus il y a de déséquilibres (trop de sucre de le sang par exemple), plus on lui demande une grande amplitude de travail : on alterne alors entre hyper et hypothyroïdie, jusqu'à ce qu'une hypothyroïdie dite "fonctionnelle" s'installe : la thyroïde n'a plus de jus, elle est fatiguée.
L’axe thyroïdien sous pression
Et chez les femmes, ce ralentissement thyroïdien, combiné à une inflammation chronique favorise :
Le SOPK (syndrome des ovaires polykystiques)
L’endométriose
Les syndromes pré-menstruels intenses
Et chez les hommes, on observe parfois une prise de poids localisée au niveau mammaire, due à une augmentation de la prolactine. C'est l'hormone qui favorise la lactation, que les hommes ont tout autant que les femmes mais qui est censée être stoppée par une hormone d'inhibition : l'hormone "PIF". Cette prise de poids au niveau mammaire peut également être exacerbée par la consommation d’aliments riches en phyto-œstrogènes (comme le houblon de la bière).
Et donc, quelles sont les conséquences (long-terme) de ces déséquilibres?
Nous pouvons les classer en 3 types : les risques accrus, les risques modérés et les maladies chroniques associées sur le long-terme.
Risques accrus : diabète de type 2, cholécystopathie, dyslipidémie, résistance à l’insuline, apnée du sommeil
Risques modérés : cardiopathies, hypertension, arthrose (notamment des genoux), goutte
Maladies chroniques associées : AVC, troubles cardiovasculaires, cancers hormono-dépendants, endocrinopathies (SOPK, hyperandrogénie), syndrome métabolique
Tout le monde n'en est pas là, fort heureusement! Et tout le monde ne va pas forcément développer ces maladies. Quand le sujet est pris à temps, il est toujours possible d'accompagner le corps vers un retour à l'équilibre.
Donc, nous y arrivons, comment accompagner la perte de poids en naturopathie?
Vous l'aurez compris, nous cherchons d'abord à revenir à un équilibre global, qui passe par plusieurs éléments :
Accompagner la flore intestinale
Diverses études ont montré que certains probiotiques ont des effets positifs sur les troubles métaboliques, sur l’axe intestin cerveau ainsi que sur la protection de la fonction barrière de l’intestin (2)
Lactobacillus plantarum, Bifidobacterium breve B-3, Lactobacillus acidophilus LA14: résultats probants sur la réduction du tour de taille, la graisse corporelle et le cholestérol.
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Akkermansia muciniphila: espèce inversement corrélée au surpoids.
Également, il est intéressant de limiter (quand cela est possible, et sur accord de votre médecin!) la médication trop fréquente qui peut avoir des effets délétères sur le foie et sur le microbiote, comme l'ont montré 3 études citées ci-dessous. Notamment, la prise fréquente d'IPP et d'anti-inflammatoires non stéroidiens (AINS) :
Les AINS augmentent la perméabilité intestinale et favorisent une inflammation de bas grade (3)
Les IPP diminuent la diversité du microbiote (4) et affectent notamment les bactéries protectrices de l'obésité (5)
Changer notre relation aux aliments : penser se nourrir et non pas se remplir 🙂
Commencer par remplacer petit à petit les aliments transformés et industrialisés par des aliments naturels en consommant des végétaux, pas uniquement cuits mais crus également, ce qui est essentiel pour l'apport enzymatique
Accompagner la régulation de la glycémie : la Chlorella a un effet détox doux sur les fringales de sucre et le Gymnéma Sylvestre a une belle efficacité sur la régulation de la glycémie
Sauter de temps en temps des repas (jeûne intermittent)
Manger méditerranéen : c'est l'alimentation la plus protectrice des risques cardiométaboliques et cardiovasculaires
Combler les carences nutritionnelles!!
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Quand vous mangez, mastiquer beaucoup, beaucoup, beaucoup!! Et essayez d'être au maximum en état de calme pendant les repas. C'est la condition sine qua non pour activer les enzymes et les sucs digestifs (sans eux, pas de bonne digestion, et qui dit pas de bonne digestion dit stockage).
Mettre les toxines et les surcharges en circulation
Se mettre en mouvement régulièrement, même si ce n'est que marcher 15 minutes par jour, mais le faire tous les jours, permet de relancer l'énergie et de faire circuler les toxines. La régularité douce sera beaucoup plus efficace qu'une grosse séance de sport d'1h, 1x par semaine. Le corps préfère la douceur constante plutôt que l'effort brusque et inconstant,
Activer la lymphe grâce au brossage à sec, au trampoline, à la natation. La lymphe est le liquide qui a pour rôle de casser les plus grosses toxines. Les grosses molécules de toxines ne peuvent pas être gérées par le sang, alors c'est la lymphe qui s'en occupe : elle les récupère, elle les détricote et elle les envoie au sang. Ce-dernier les achemine ensuite aux reins pour élimination (l'urine n'est qu'un filtrat du sang géré par les reins!),
Faire des bains dérivatifs : ils font circuler les graisses brunes réparatrices (au détriment des graisses blanche de stockage) et activent la régulation thermique, immunitaire, métabolique et cardiovasculaire.
Une fois les toxines mise en circulation, il est crucial de les éliminer!!! 2 tips :
Transpirer et respirer profondément : sauna, hammam
Boire beaucoup et donc, uriner beaucoup
Pour aller plus loin : vous pouvez faire un bilan de biologie fonctionnelle qui permet de traquer certains marqueurs en particulier comme le degré de votre porosité intestinale, le degré de votre stress oxydatif, la capacité métabolique de votre corps à gérer les lipides, etc. Cela se fait dans des laboratoires indépendants, sur demande de votre naturopathe ou de votre médecin spécialisé en santé fonctionnelle.
En conclusion : vers une détox globale, ancrée et consciente
La perte de poids durable ne se résume donc ni à une question de volonté ni à un simple calcul de calories. Elle implique un véritable retour à l’équilibre, une reconnexion à soi dans toutes ses dimensions : physique, émotionnelle, mentale et physiologique.
Adopter une approche globale, c’est reconnaître que le corps ne fonctionne pas en silos. Nos organes, nos hormones, notre microbiote, nos émotions, tout interagit. Et parfois, ce n’est pas tant de gras qu’il s’agit de se délester, mais de surcharge mentale, de stress accumulé, de blessures enfouies, de toxines ...
Travailler le terrain biologique est essentiel. Mais sans prendre en compte les mémoires émotionnelles, les conflits internes ou les habitudes ancrées dans l’inconscient, ce travail peut rester en surface ou il peut dériver vers d'autres processus de compensation : la cigarette, faire du sport à outrance, se plonger dans le sexe ou le workaholisme, etc.
D'où l'importance de ne pas être dans une posture de lutte contre son propre corps mais plutôt dans une attitude d’écoute, de respect et d’accompagnement. Votre corps est votre meilleur allié, c'est votre médecin intérieur qui vous donnera toujours les bonnes indications, à condition de travailler avec lui main dans la main.
Pour citer quelques études :
(1) https://www.nature.com/articles/nature12506
(2) https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/37249983/
(3) https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29221664/